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Les interviews

Rêves itinérants... [Cie Babylone]

Entretien avec Anna Delpy, Patrice Cuvelier et Sébastien Delpy de la compagnie Babylone.

En résidence itinérante de Guerlesquin à Plouigneau (photos par ici...) dans le cadre du Mai des Arts dans la Rue, la compagnie Babylone travaille sur sa nouvelle création Le cabaret fréquent.

Pour interviewer la compagnie, il a fallu d’abord réduire le collectif (13 personnes en résidence) à trois porte-paroles. Les volontaires seront finalement Patrice, Anna et Séb.

Ensuite, il nous fallait trouver un lieu à l’abri de la pluie. A défaut d’une cuisine comme le veut la coutume dans cette rubrique, l’entrevue s’est tenue dans le camping-car d’Anna. Le décor idéal pour rêver d’itinérance...

Quel est le projet de la compagnie Babylone à l’origine ?

Patrice : Le projet a démarré avec des jeunes d’un centre de loisirs, dans le cadre d’un atelier. Un noyau dur, désireux de s’investir à fond dans la pratique du théâtre, s’est formé. Au bout d’un moment, c’est devenu compliqué de continuer dans le cadre du centre. On a donc créé une association qui s’est appelée Entre chiens et loups, puis une autre, Pazzo Pazzo, qui a abouti à la création du spectacle Les anges aux ailes cassées.

Plus tard, j’ai repris les rênes avec Sophie, avec qui je travaille depuis longtemps, pour fonder la compagnie Babylone. C’est à ce moment là que le groupe est devenu professionnel.

Comment définiriez-vous Babylone aujourd’hui ?

Anna  : Comme une aventure humaine faite de personnes désireuses de raconter des histoires et de vivre des choses ensemble... Qu’est-ce que tu dirais Séb ?

Sébastien : Rien... Je regarde le camping-car d’Anna, il est vachement bien !

Plus sérieusement, je dirais que Babylone s’est construit autour du jeu de comédien, de l’incarnation de personnages. Moi je suis arrivé à l’époque de Pazzo Pazzo en tant que technicien, mais très vite j’ai voulu monter sur scène, et je ne suis jamais redescendu...

Pourquoi ce nom Babylone ?

Patrice : C’est très anecdotique. Ca vient de Jeff, le copain de Sophie. Il a trouvé ce nom au moment où on discutait des fondements de cette nouvelle compagnie. C’est sorti comme ça. Il n’y a aucun sens caché.

Anna : Si... Jeff nous a dit un jour : « Chez vous, c’est vraiment Babylone ! ».

Et qu’est-ce que ça veut dire ?

Anna : Ca veut dire que c’est la démocratie, mais que c’est vraiment le bordel ! J’espère seulement que la compagnie finira pas comme notre société.

Patrice : Il y a aussi la ville historique, la grande Babylone. Cette ville chaotique était totalement expérimentale dans l’histoire des civilisations.

Finalement ça a du sens...

Anna : Oui, c’est pour ça que ça nous a plu. D’ailleurs on a organisé pendant plusieurs années un rendez-vous qui s’appelait Les Folies suspendues de Babylone, qui rappelle les jardins suspendus de Babylone.

Vous êtes actuellement en résidence itinérante en Pays de Morlaix. En un mot, que signifie pour vous l’itinérance ?

Anna : Trimballer son théâtre...

Patrice : voyager...

Sébastien : être autonome.

Quand on se penche sur l’histoire de la compagnie, on remarque que votre installation à Mitry-Mory, où vous avez votre lieu de fabrique, a été une étape essentielle pour la compagnie. Comment s’articule cette relation entre un territoire et l’itinérance ?

Patrice : Le Nid à Mitry est avant tout notre lieu de fabrication, pas un lieu d’exploitation. C’est important d’avoir un lieu pour créer, stocker et vivre... Il ne suffit pas de rêver l’itinérance, ça se prépare. On est vraiment content d’être à Mitry-Mory car c’est une commune qui nous accueille à bras ouverts.

Anna : C’est extrêmement compliqué pour une troupe d’être complètement itinérante. Sans port d’attache, il est difficile d’obtenir des aides financières car il faut être attitré à une mairie, un territoire. Cela ne nous empêche pas de partir sur les routes quand on le souhaite.

Sébastien : Certains d’entre nous vivent à Mitry dans des véhicules sur roues. Même là-bas, l’itinérance est sous-jacente.

Anna : Dans itinérance, il y a “itinéraire”. Pour notre prochaine tournée, on voudrait tracer un parcours et faire des étapes tout du long. Quand on fait des tournées en étoile, on passe plus de temps sur la route qu’à rencontrer le public, les autres artistes, les gens qui nous accueillent. On est frustré d’un manque de rencontres humaines.

Est-ce différent dans le cadre d’une résidence comme celle-ci ?

Anna : Complètement. Quant tu t’installes sur la place publique en dehors d’un festival, les gens sont beaucoup plus disponibles. On a des rapports privilégiés avec eux. On peut prendre le temps de leur expliquer qui on est, ce qu’on fait.

Dans le cadre de cette résidence, vous travaillez sur votre nouvelle création Le cabaret fréquent. Quelle place occupe ce spectacle dans l’évolution artistique de la compagnie ?

Sébastien : Je crois que c’est la fin d’un cycle après Les Vieux démons, un spectacle qu’on a du mal à tourner parce que les festivals préfèrent acheter des spectacles plus petits et les accumuler pour remplir le temps. Pour cette nouvelle création, on s’est donc dit qu’on allait faire une petite forme. Et à Babylone, une petite forme ça donne ça !

Anna : Le principal changement par rapport aux autres spectacles, c’est l’occupation de l’espace. Dans les Vieux Démons, le public est installé tout autour de l’arène dans laquelle se déroule l’action. Dans le Cabaret, le public est placé au centre du cercle délimité par les caravanes et nous nous jouons autour et à l’intérieur.

On donne surtout davantage la parole au public. C’est quelque chose qui a pris forme pendant les grèves de 2003. On organisait à ce moment là des forums citoyens à la place de nos spectacles et on s’est rendu compte à quel point les gens avaient des choses à dire.

Patrice : Ce spectacle est construit de manière à être exponentiel. On peut réinventer les histoires en fonction du lieu où on joue, faire des minis créations à l’intérieur de cet univers. C’est aussi une scène ouverte dans laquelle on peut inviter d’autres artistes à se produire. Plus qu’un spectacle, on a créé une forme.

Dans ce spectacle, on entre de plein fouet dans l’univers d’une famille avec ses propres règles, ses fortes têtes... C’est quelque chose que l’on retrouve au sein d’un collectif comme Babylone ?

Anna : Cette création met en scène la vie d’une troupe et donc forcément on peut tomber dans le piège de s’auto-représenter.

Sébastien : Dans notre travail, on a de toute façon un recul sur le jeu de comédien. Même à travers des personnages, ce côté famille se ressent.

Qui mène la famille Babylone ?

Anna : C’est lui.

Patrice : C’est vrai que je suis le meneur, mais on a toujours eu avec Sophie une volonté de responsabiliser tout le monde, même celui qui vient juste d’arriver dans la compagnie. Les décisions se prennent collectivement.

Sébastien : Quand on arrive pas à se décider, Sophie et Patrice sont là pour trancher. Dans toute famille il y a une “hiérarchie”, même si je n’aime pas ce terme. Mais celui qui a envie de prendre des responsabilités dans telle ou telle chose, il le peut... c’est même conseillé.

Anna : On nous dit souvent que la collectivité c’est de l’utopie, mais dans notre cas, cette utopie marche depuis 19 ans !

Entretien réalisé le 19 mai 2005 à Plouigneau.

Retrouvez la compagnie Babylone avec le spectacle Les Vieux démons dans le cadre de la programmation 2005 du FAR de Morlaix (par ici...).

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